Les pré-requis pour entrer à l'Université, que faut-il en penser ? Si l'expression peut signifier une sélection dissimulée, inacceptable pour le Sgen-CFDT - elle peut aussi renvoyer à une orientation active...
Formulée ainsi, cette notion de « pré-requis » laisse à penser que tous les élèves titulaires du bac n’ont pas leur place dans les formations de l’ESR.
Nous nous élevons contre cette vision malthusienne ! Tout élève doit pouvoir continuer à mettre en œuvre son projet.
Garantir à tous les bacheliers une place dans le post-bac
Cependant face à la croissance actuelle des effectifs, tout le monde s’accorde sur le fait que le tirage au sort actuel est la pire solution. Il ne repose en effet sur aucun critère de motivation ou de capacité du futur étudiant. Mais face à une gestion de crise des flux de nouveaux entrants en L1, que proposer d’autre pour accueillir dans les meilleures conditions possibles les étudiants? Que faire pour favoriser au mieux leur réussite ?
La première solution, c’est une sélection sur dossier, sur la base de la série du bac et des notes de terminale. Chaque faculté, IUT, BTS… choisit ceux qu’il considère comme les meilleurs, sans autre préoccupation. Les bacs S auront accès en priorité à l’ensemble des filières ; quant aux bacs professionnels, leurs perspectives seront certainement beaucoup moins intéressantes ! Cette piste n’est donc pas acceptable.
Une autre approche existe, plus respectueuse de la liberté d’inscription à l’université. Elle mérite d’être explorée même si elle est plus complexe à mettre en œuvre. Il s’agirait de privilégier une vraie « orientation active ». Elle prioriserait les inscriptions dans une filière à partir d’une analyse fine du dossier de chaque candidat, ce qui n’est pas le cas actuellement. Cela suppose en premier un travail commun entre les enseignants du second degré et du supérieur. Il s’agit en effet d’éviter un décalage entre compétences acquises des élèves et compétences nécessaires à la réussite dans la formation choisie. Cette orientation implique un accompagnement personnalisé, tout au long du continuum bac-3/bac+3. On est bien là très au-delà d’une sélection sur la série du bac et/ou sur la moyenne générale.
Privilégier une vraie orientation active
Le fait pour un étudiant de pouvoir accéder à une filière adaptée à son profil et à son parcours, et d’avoir travaillé en amont à son orientation, devrait permettre de limiter des inscriptions dont on sait déjà, en début d’année, qu’elles sont vouées à un échec souvent douloureux. Ainsi, si on raisonne dans le système actuel, un bac littéraire ou un bac ES ne pourrait pas être inscrit automatiquement en médecine. De la même façon un bac S ne pourrait pas être inscrit automatiquement en droit, etc. De même, s’ils le souhaitent, les bacs professionnels se verraient réserver prioritairement les places en BTS, et les bacs technologiques en IUT.
Se pose alors inévitablement la question des dispositifs d’accompagnement. Il faut en effet éviter d’enfermer définitivement les étudiants dans une filière. Parce que les choix n’en sont pas toujours et parce que ces mêmes choix ne sont pas définitifs (et surtout pas à cette période de la vie). Il est donc important de concevoir de tels aménagements. Ces dispositifs pourraient donner lieu à une année de remise à niveau dans certains cas. Dans d’autres cas, une ou plusieurs unités d’enseignement de remédiation, un contrat pédagogique avec l’étudiant permettraient de répartir sa formation de licence sur 4 ans le cas échéant (avec un droit à la bourse maintenu sur la totalité du cursus). L’orientation sur dossier et ces dispositifs pourraient aussi faciliter la transition pour les étudiants de bacs généraux présentant les plus grandes fragilités, grâce à une affectation dans une filière où leur chance de réussite sera meilleure ou en les intégrant à un dispositif de remédiation en fonction de leur choix.
Faire évoluer le bac
Mais une telle organisation est indissociable de la mise en place d’un bac modulaire qui se construirait au fil du parcours de l’élève. Un accompagnement continu à l’orientation se ferait alors dans le cadre du « parcours Avenir » de la seconde à la première année post-bac (au moins). La construction de ces modules doit reposer sur des blocs de compétences, précisant non seulement les compétences disciplinaires mais aussi les compétences transversales acquises. Enfin, le choix des modules de ce bac se ferait à partir du projet d’orientation. Les choix ne seraient ainsi pas définitivement fermé, contrairement aux filières actuelles. Même si éventuellement changer de projet implique nécessairement de compléter sa formation avec d’autres modules).
Les accompagnements mis en place (pour certains au lycée et pour d’autres dans le sup) permettraient d’acquérir les modules nécessaires à l’orientation visée –avec idéalement un co-portage entre le lycée et l’enseignement supérieur. Ainsi, dans un tel système, l’orientation cesserait de s’apparenter à un processus d’exclusion par l’échec. La filière S, actuellement au sommet de la hiérarchie, pourrait ainsi retrouver sa vocation de former les élèves à une poursuite d’études dans les filières scientifiques. L’orientation deviendrait enfin le processus de construction pour chaque élève de son parcours, en fonction de ses centres d’intérêt.