Baccalauréat 2021, de la complexité à l’incohérence

Les objectifs annoncés de la réforme du Baccalauréat tendaient à simplifier l'examen, à prendre en compte le contrôle continu et à mieux préparer les élèves à leur poursuite d'études.
Ces objectifs disparaissent dans la complexité, voire l'incohérence, des textes proposés

Une synthèse des textes présentés au CSE du 21 mars 2018 et des commentaires qui apparaissent en orange et en italique

Le décret

Le baccalauréat général ne fait plus référence à des séries, au contraire du baccalauréat technologique.

Une occasion manquée de fusionner les voies générales et technologiques.

Les questions de mixité sociale et de réduction des inégalités ne sont pas envisagées par la réforme.

La disparition des séries générales est néanmoins une avancée.

Le Bac évalue désormais :

  • Un socle de culture commune avec une place restreinte pour les sciences
  • Des enseignements de spécialité choisis par les élèves
  • Des enseignements optionnels, le cas échéant, limité à 2 en classes de terminale, mais à 1 seulement en classe de première

Un socle de culture commune nécessite un temps de validation de la part des équipes, différent des évaluations successives.

Le choix de spécialités par les élèves serait une avancée si les spécialités étaient organisées en modules pour construire des réels parcours de formation.

Une organisation de la scolarité en semestres aurait permis la construction des parcours de façon progressive.

Les spécialités de Terminale s’inscrivent dans la continuité de celles de Première : les parcours ne sont pas réversibles.

Les épreuves

  • 1 épreuve anticipée de français en 1ère
  • 4 épreuves terminales : 2 spécialités, une épreuve de philosophie et un grand oral.

Conforme aux annonces du candidat président

Un contrôle continu

Une part de contrôle continu est introduite dans l’évaluation et la délivrance du Bac.

Une bonne chose parce que cela reconnait le professionnalisme des enseignants. Mais des épreuves de contrôle continu, c’est proposer un « faux » contrôle continu.

Enseignements optionnels

Les candidats ne peuvent pas prendre plus de 2 enseignements optionnels (dont 1 des 3 de terminale : maths complémentaires ou expertes et DGEMC)

Une bonne chose pour alléger la charge de travail des élèves

Compensation des notes

Il est regrettable que les notes des différentes matières se compensent dans une moyenne globale. C’est contradictoire avec un socle de culture commune qui doit être acquis par tous les élèves.

Conservation des notes

Seules les notes supérieures à 10 des épreuves terminales peuvent être conservées pendant 5 ans.

Une bonne chose que la conservation des notes des épreuves pour permettre aux élèves de se concentrer sur les enseignements dans lesquels ils ont plus de difficulté.

Les spécialités font partie du contrôle continu dans le cadre des 10% : à espérer qu’elles seront retirées du contrôle continu si elles sont conservées et que l’élèves ne sera pas obligé d’assister aux cours…  Peut-être serait-il intéressant que l’élève puisse prendre une autre spécialité qui ne serait prise en compte pour l’examen que si la note est supérieure à celle conservée ?…

Rattrapage

L’élève peut choisir entre une épreuve de contrôle ou l’examen de son livret scolaire

Pourquoi ne pas faire confiance au livret scolaire et valider le Bac au moment du jury ? Pas besoin d’un 2nd groupe d’épreuves pour prendre en compte le livret. Ce serait une vraie simplification.

Le choix pour l’élève entre livret et épreuve de rattrapage est peut-être néanmoins une bonne chose pour l’élève…

Modalités des épreuves

  • Anonymat pour les épreuves terminales et communes de contrôle continu
  • Banque nationale numérique de sujets pour les épreuves communes de contrôle continu

Anonymiser le contrôle continu est une lourdeur administrative. Plus important, l’anonymisation et la correction par un autre professeur que celui qui dispense le cours pour un traitement objectif du candidat relève du mythe. C’est de plus, par son cadre contraignant, contradictoire avec l’idée d’un contrôle continu des apprentissages des élèves.

Une banque nationale de sujets est intéressante si elle est construite à titre d’exemple. On peut craindre qu’elle ne soit qu’une contrainte de plus favorisant le bachotage. Il est préférable de responsabiliser les enseignants localement afin qu’ils construisent ensemble des sujets en fonction de leurs progressions, qu’ils bâtissent des barèmes en commun, qu’ils harmonisent entre eux leurs notes.

Il faut faire confiance aux enseignants et à leur professionnalisme.

Arrêté relatif aux épreuves du Baccalauréat général

Épreuves terminales

Coefficient des épreuves

Épreuves Coefficients
Français (Écrit + oral) 1O
Philosophie 8
Grand oral 10
Spécialité 1 16
Spécialité 2 16
Total 60

 

Les épreuves du Bac en contrôle continu

  1. Enseignements du socle de culture commune : Français, Philosophie, Histoire-géographie, EMC, LV1 et LV2, Humanités scientifiques et numériques, EPS.
  2. Enseignements de spécialité : 3 en classe de 1ère et 2 en Terminale
  3. Enseignement optionnel 1 : Arts, EPS, LCA, LV3, Engagement citoyen-Hippologie-Agronomie (EAP)
  4. Enseignement optionnel 2 en terminale : Maths expertes, Maths complémentaires, DGEMC

Des épreuves de contrôle continu : c’est proposer un « faux » contrôle continu avec des modalités de « mini Bacs ».

Des modules semestriels auraient permis de mettre en œuvre des certifications (Par l’équipe pédagogique) en fin de période d’acquisition des apprentissages. (Par semestre, comme proposé par le rapport Mathiot)

Une idée intéressante et à suivre d’un enseignement d’humanités scientifiques et numériques s’il devient un enseignement pluridisciplinaire.

Évaluation du contrôle continu :  10% + 30%

  1. Un coefficient 10 est attribué à la moyenne de toutes les notes (A, B, C, D) qui ont le même poids. (Bulletin scolaire)
  2. Un coefficient 30 est attribué à la moyenne des notes obtenues lors des 3 épreuves communes de contrôle des enseignements suivants : Histoire-géographie, LV1, LV2, Humanités numériques, EPS et la 3ème spécialité abandonnée en fin de la classe de 1ère.

Remarque : les enseignements optionnels ne sont évalués que dans le cadre 1 des 10%.

Quelle complication ! Un seul contrôle continu est souhaitable, les enseignants validant en équipe les acquisitions en termes de compétences et de connaissances des élèves.

La spécialité abandonnée sera évaluée dans le cadre des 10% et des 30% et aura donc en Première plus de poids que les 2 autres spécialités.

 Le grand oral de terminale : 20’ en 2 parties :

  • Présentation d’un projet adossé à l’un des deux enseignements de spécialité
  • Échange avec le jury pour évaluer les connaissances acquises, notamment scientifiques et historiques

L’évaluation « encyclopédique » de connaissances n’est pas souhaitable. Les 20’ doivent rester consacrées au seul projet de l’élève, ou du groupe d’élève, pas seulement les 10 premières minutes. Il faut profiter de cet oral pour en faire, le cas échéant, une occasion de travail collaboratif.

Maintien des ECE pour les spécialités SVT et SPC (4 points/20)

Une bonne chose de conserver ces évaluations… Auxquelles s’ajoutent toutes les autres hélas…

 Arrêté relatif aux modalités d’organisation du contrôle continu

 30% est constitué des notes obtenues aux épreuves communes de contrôle continu

10% est constitué de l’évaluation chiffrée annuelle et renseignée dans le livret scolaire

Même remarque que précédemment : 1 contrôle continu et 1 seul est souhaitable, en faisant confiance aux enseignants qui certifient collectivement des acquisitions.

Épreuves communes de contrôle continu 

2 épreuves communes au 2ème et au 3ème trimestre de la classe de Première

1 épreuve commune au début du 3ème trimestre de la classe de Terminale

Quelles complications ! Le Sgen-CFDT propose une évaluation semestrielle et une organisation de l’année semestrielle, ne serait-ce que pour préparer à l’enseignement supérieur.

Les épreuves communes de Terminale au 3ème trimestre vont se dérouler juste avant les épreuves terminales. Un 3ème trimestre bien compliqué.

L’évaluation des spécialités ne sera pas prise en compte pour Parcoursup alors que c’était un objectif de la réforme du Bac.

Les établissements d’enseignement supérieur vont continuer « à sélectionner » leurs futurs étudiants sur seulement 10% du Bac, sans permettre une adéquation entre attendus et spécialités choisies par   l’élève.

Sujets

Les sujets sont élaborés nationalement et centralisés dans une banque nationale numérique de sujets

Les enseignants ne sont-ils pas capables, universitaires maitrisant les référentiels disciplinaires, d’élaborer des sujets ? Que des sujets nationaux soient donnés à titre d’exemples soit, mais ils ne doivent pas s’imposer et imposer un bachotage naturel de la part des élèves.

Organisation

Art 4 « Le Conseil Pédagogique ou le chef d’établissement… est consulté sur le protocole d’anonymisation et de correction des copies » (Correction par un autre professeur que celui de l’élève)

Chaque élève est convoqué nominativement. Absence justifiée = remplacement, non justifiée = 0

Texte peu clair qu’il convient de préciser. Soit on laisse l’initiative aux établissements, soit on ne leur laisse pas… Quel rôle exactement pour le Conseil Pédagogique et le chef d’établissement ?

Quel statut pour ces copies d’examen ? Archivage ? Rendues aux candidats ? Avec des corrigés qui risqueraient de donner les corrigés types des sujets de la banque nationale ?…

Une commission d’harmonisation prend connaissance des notes transmises par les établissements et les harmonise

Les enseignants peuvent harmoniser localement, pas forcément entre établissements avec l’intervention de l’Inspection pédagogique, même si c’est une façon d’éviter les recours. C’est les responsabiliser.

Fraude : code de l’éducation D.334-25

Quelle lourdeur, qui va assurément reposer sur les équipes de direction !

Les enseignants sont capables d’harmoniser eux-mêmes au sein d’un établissement ou d’un groupe d’établissements.

Note globale de contrôle continu 

A partir des notes dans le cadre des 10% et des 30%, « le chef d’établissement fait une proposition de note globale de contrôle continu, pour chaque élève et chaque enseignement… » Définitive après délibération du jury d’examen.

Quel temps on va perdre dans les lycées alors qu’avec une seule note de contrôle continu, on simplifiait et on validait de réelles acquisitions des élèves.

Va-t-on en plus conserver les conseils de classe classiques pour faire le point sur le travail des élèves ?

Redoublement de la Terminale : le candidat conserve les notes du contrôle continu de la classe de Première.

 

Les épreuves du Bac vont être considérablement alourdies par de nombreuses situations d’examen différentes et successives :

 -Un contrôle continu au fil de l’année scolaire (10%)

-Un contrôle continu sous forme d’épreuves communes (30%) en 1ère (2ème et 3ème trimestre) et en terminale (3ème trimestre)

-Un CCF pour l’EPS qui est conservé

-Des ECA qui demeurent pour les LV1 et LV2 (on connait la lourdeur de leur organisation)

-Des ECE qui demeurent pour la SVT et les SPC

-Des épreuves terminales en fin de 1ère (EAF) et en fin de terminale (4 épreuves dont l’oral) + éventuel rattrapage.

En multipliant le nombre des évaluations sommatives pour l’examen, ce sont les autres évaluations, formatives et certificatives, qui sont mises de côté. On renforce le bachotage et on perturbe le rythme des apprentissages.

On passe d’objectifs raisonnables pour une réforme du Baccalauréat à une organisation complexe qui manque de cohérence.