Santé, sécurité et conditions de travail : un bilan toujours aussi inquiétant au Ministère de l’Éducation Nationale

Le bilan Santé et Sécurité et conditions de travail 2022 de l’Éducation Nationale a été présenté à la formation spécialisée ministérielle le 23 novembre 2023.
Il concerne 1 100 000 agents dont 750 000 enseignants du 1er et du 2nd degré.
Pour le Sgen-CFDT, les résultats sont inquiétants.

Les données de ce bilan santé, sécurité et conditions de travail sont tirées des réponses des 30 académies  à l’enquête ministérielle annuelle.

Leur périmètre comprend les 43 113 écoles publiques, 8252 EPLE ET EREA et 824 services  (DSDEN, Rectorat, CIO, ..) de l’Éducation nationale.

Elles sont strictement déclaratives et ne reflètent pas toujours la réalité ou l’effectivité d’une mesure auprès des agents.

Un établissement peut  ainsi déclarer avoir mis en place un registre santé et sécurité au travail sans l’avoir réellement fait ou rendu accessible aux personnels.

Focus sur ce qui intéresse prioritairement le Sgen-CFDT : les mesures bénéficiant aux agents et agentes sur leur lieu de travail.

Une  médecine de prévention quasi inexistante

En 2022, 77 médecins étaient en poste pour 63 équivalent temps plein soit 1 pour 17 500 agents.
4 académies ne disposaient même d’aucun médecin

Ce  très faible nombre de médecins du travail ne permet pas le suivi médical des agents et notamment la visite quinquennale obligatoire.

Le recrutement d’autres professionnels au sein d’équipes pluridisciplinaires était censé améliorer la situation. Mais là encore le bilan est catastrophique.
Seules 29 infirmières du travail étaient en activité dans 16 académies, 14 n’en disposaient donc pas.
Même situation pour les 24 postes de psychologues du travail répartis sur seulement 16 académies. Une seule académie disposait d’un ergonome.

Malgré leur professionnalisme et leur investissement, les personnels de santé concernés sont débordés et souvent victimes d’épuisement professionnel.

Pour le Sgen CFDT, il est urgent d’agir .

Des assistant.e.s de prévention sans temps et sans moyens

70 % des agents désignés comme « assistant de prévention » consacrent moins de 20% de leur temps de travail à cette  mission. Ils sont déjà débordés par leurs autres fonctions.

C’est notamment le cas dans le 1er degré où ce sont des conseillers de circonscription – souvent EPS – qui sont « désignés volontaires ».

30% des assistants ne disposent toujours pas de lettre de cadrage et parfois même de la formation obligatoire.
Les conséquences sont graves pour les agents car l’agent de prévention est censé être leur premier interlocuteur pour toutes questions ou problèmes liés à leur santé au travail, leur sécurité ou leur conditions de travail.

Conséquences également pour les encadrants (IEN, directeurs d’école, chef d’établissement et de service) qu’ils sont censés conseiller et accompagner dans la mise en place et la tenue des procédures SST (registre santé et sécurité , DUERP, PPMS, Vigipirate, incendie, amiante, etc..). Toutes les organisations syndicales ont dénoncé cette situation.

Le Sgen-CFDT demande depuis plusieurs années du temps dédié suffisant, des moyens et une indemnité spécifique pour cette fonction.

Risques Psycho Sociaux (RPS) et ambiances thermiques au menu des registres santé et sécurité au travail

Sans surprise, les risques psycho sociaux (36,8%) et ceux liés aux ambiances thermiques (25%) sont les plus signalés, loin devant les autres familles de risques. Pour le Sgen-CFDT, malgré un plan de prévention mis en place en 2013, les RPS n’ont jamais fait l’objet d’une véritable prise en compte par nos employeurs.Santé, sécurité et conditions de travail

80% des écoles et établissements et 70% des services disposeraient d’un registre santé et sécurité au travail (RSST) ouverts aux agents  et aux usagers.

Le Sgen-CFDT reste dubitatif sur ces données

Ces chiffres contredisent nos remontées de terrain qui montrent que de nombreux agents  ignorent encore l’existence du RSST sur leur lieu de travail.

Ces 42 000 registres ouverts en 2022 n’auraient engendré que… 13 125 signalements.

Il est fort probable qu’un certain nombre d’écoles, d’établissements et de services aient déclaré l’avoir mis en place sans l’avoir réellement fait ou rendu son utilisation effective par les agents.

Notre syndicat invite chaque agente, chaque agent à demander où se trouve le registre santé et sécurité au travail de son lieu de travail, et à contacter le Sgen-CFDT de son académie en cas de problème ou d’absence de registre.

Document unique d’évaluation des risques professionnels (DUERP) : des chiffres en trompe l’œil.

Dubitatif sur le bilan des RSST, le Sgen CFDT est plus que  sceptique sur ceux concernant la réalisation des documents uniques  d’évaluation des risques professionnels (DUERP).
25 403 écoles et 2 900 collèges en seraient dotés. Comment de tels chiffres sont-ils possibles alors que l’immense majorité des directeurs d’école n’ont pas été formés à les mettre en place ?

De même, pour les collèges, alors qu’il s’agit d’une démarche censée être participative et associant les agents, la plupart de nos  collègues nous disent ne pas l’avoir vu mise en œuvre ou la connaître.

Bizarrement, les chiffres sont beaucoup plus réalistes pour les autres structures :  1 496 lycées et EREA sur  8 252 et 179 services sur 824 auraient un DUERP.

Faut-il rappeler que le DUERP est une obligation règlementaire de l’employeur depuis plus de 20 ans  et qu’il devrait être en vigueur dans 100 % des établissements et services du Ministère !

Pour le Sgen-CFDT, la réalisation du DUERP doit associer l’ensemble des agentes et agents. Cette démarche doit donc s’illustrer par la consultation des collectifs de travail et une élaboration collective tant pour sa mise en place que pour son actualisation.

Violences, discrimination, harcèlement, agissements sexistes (VDHA)

En 2022, la mise en place des dispositifs de signalements et de référents VDHA dans les CHSCT était encore trop récente pour que les chiffres soit significatifs : 14 académies seulement sur 30 avaient recueilli  635 signalements dans le cadre de dispositif dédié.

Les syndicats  Sgen-CFDT et leurs élu.e.s s’engagent avec détermination pour que les victimes puissent bénéficier  des dispositifs de signalement, de traitement et d’accompagnement et des procédures dédiées, dans chaque académie.

Recensement des documents techniques amiante (DTA)

Seules 20 académies déclaraient avoir mis en place une procédure de recensement de DTA. Ce document est  obligatoire pour tous les bâtiments construits avant 1997 susceptibles d’en contenir.

Au-delà du  recensement des DTA, le Sgen-CFDT s’inquiètent surtout des mauvaises conditions de diffusion des auto-questionnaires auprès des agents.

Cette procédure permet à chaque agent de reconstituer ses expositions à l’amiante au cours de sa carrière et de bénéficier éventuellement d’une surveillance médicale spécifique. Or, de nombreux agents susceptibles d’avoir été exposés continuent de partir à la retraite sans avoir eu connaissance de ce dispositif.

Le Sgen-CFDT invite chaque agente, chaque agent à demander si le DTA de son lieu de travail a été effectué et à contacter le Sgen-CFDT de son académie pour plus d’information.

Des conséquences sur l’attractivité des métiers.

Pour le Sgen-CFDT, ce bilan montre, comme chaque année, que nos employeurs et chefs de service sont dans l’incapacité d’assurer la plupart des obligations règlementaires à l’égard de leurs agentes et agents.

Les acteurs, instances et procédures qui devraient leur  permettre de signaler et de traiter les problèmes rencontrés au quotidien  dans leurs missions fonctionnent peu ou mal.

La réforme des retraites a ajouté découragement et ressentiment pour toute une génération qui n’a jamais bénéficié de la moindre médecine du travail… Comment ne pas y voir un des premiers motifs de perte d’attractivité de nos professions.