Coupes budgétaires à l’Education nationale : dans le flou après le coup de rabot

En quelques mois, nous sommes passés de l'amélioration du schéma d'emploi aux coupes budgétaires. A l'initiative des organisations syndicales, le ministère a commencé à en présenter les effets.

Toutes les organisations syndicales représentatives des personnels de l’Éducation nationale avaient demandé ensemble que les conséquences des coupes budgétaires annoncées par Bruno Lemaire fassent l’objet d’un débat en conseil social d’administration ministériel (CSAMEN).

Un premier échange a donc eu lieu le 13 mars 2024. Un premier, car il en faudra d’autres pour avoir des clarifications et en mesurer vraiment l’impact.

Les coupes budgétaires à l’Éducation nationale : état des lieux

Les prévisions de croissance ayant été revues à la baisse, le gouvernement a pris la décision brutale d‘effacer 10 milliards d’euros de dépenses de l’État à peine deux mois après la promulgation de la loi de finances. Le but est de limiter autant que possible la charge de la dette. Mais le seul levier activé est celui de la baisse des dépenses de l’État.

Pour l’Éducation nationale, cela se solde par l’annulation de près de 700 millions d’euros de dépenses dont 70% concernent la masse salariale.

D’autres ministères sont touchés et certains pour des montants et des proportions plus fortes que notre périmètre.

D’après le ministère de l’Éducation nationale, les annulations de crédits vont d’abord porter sur les crédits mis en réserve. Cela permettrait d’absorber 85% des annulations de crédits. Le ministère affirme ne pas toucher aux emplois, et notamment pas aux mesures annoncées lors du CSAMEN de décembre 2023.

Le Sgen-CFDT est resté plus que perplexe sur cette première analyse des impacts des coupes budgétaires pour le système éducatif. Le ministère a annoncé des points de situation pour préciser les effets des coupes budgétaires lors d’un prochain CSAMEN.

Les interventions du Sgen-CFDT lors du CSAMEN du 13 mars 2024

Dès la déclaration liminaire, nous étions intervenus sur les coupes budgétaires.

Puis, dans le cadre du débat à l’ordre du jour, nous avons interrogé le ministère sur sa présentation des conséquences des coupes budgétaires.

En décembre 2023, la modification du schéma d’emploi (permettant des créations de postes dans le 2nd degré et des suppressions un peu moins nombreuses que prévu dans le 1er degré), est annoncée comme financée sur la trésorerie du ministère et donc ses réserves.

Si désormais les réserves sont absorbées par les coupes budgétaires, comment sont financés ces emplois ? ou plutôt qu’est-ce qui n’est plus financé ?

Pour le Sgen-CFDT, cela augure de renoncements importants à réaliser des recrutements pour couvrir les besoins alors même que de nombreuses classes sont sans enseignant.e pendant plusieurs mois. Nous redoutons une aggravation encore plus forte dans les mois qui viennent et à la rentrée 2024 des absences longues non remplacées.

Par ailleurs, le ministre de l’Économie et des finances annonces une réduction des dépenses de l’État de 20 milliards d’euros en 2025, et n’exclut pas d’autres coupes dans les mois qui viennent.

Pour le Sgen-CFDT, l’argument qui consiste à minorer ces coupes parce qu’elles représentent moins d’1% de l’ensemble du budget de l’Éducation nationale ne tient pas. En dynamique, ce sera plus, compte tenu des annonces du Ministre de l’Économie et des finances.

Le système éducatif est déjà très fragile depuis plusieurs années par manque de personnels, et là, on renonce à financer des emplois qui manquent, sans expliquer clairement à la population la dégradation du service public que cela génère.

Le Sgen-CFDT a aussi critiqué le refus idéologique du gouvernement de penser une fiscalité plus juste, plus progressive. Les plus hauts revenus doivent davantage contribuer à la solidarité nationale. C’est indispensable pour conduire des politiques publiques ambitieuses en termes de progrès social, et assurer des services publics de qualité. Au lieu de cela, le gouvernement fait le choix de maintenir des subventions sans contrôle ni contrepartie aux entreprises, de sabrer dans les dépenses publiques et de rogner sur la solidarité avec les plus fragiles.

Au contraire, la CFDT porte des propositions pour une fiscalité plus juste, à l’appui de politiques de solidarité, et de développement durable. C’est aussi ce qu’elle a défendu dans une tribune signée avec d’autres syndicats et associations parue dans le journal Le Monde récemment.

Pour le Sgen-CFDT, de telles décisions nous mènent dans une impasse sociale et démocratique.